Feder, Frédéric

Cartographie des sols de l'ouest de l'île de la Réunion

Les informations contenues dans cette page proviennent essentiellement des articles et posters suivants :

Résumé

L’utilisation d’anciennes cartes pédologiques peut poser de nombreux problèmes d’interprétation ou de réactualisation, notamment pour construire des cartes thématiques appliquées aux préoccupations actuelles. Une étude sur l’évaluation de la vulnérabilité de la nappe phréatique dans l’ouest de l’île de la Réunion nous a conduits à recenser et à évaluer les données disponibles sur les sols. À l’issue de ce recensement, l’analyse critique des cartes et données pédologiques existantes nous a montré qu’elles n’étaient pas directement utilisables pour notre étude et que cela tenait essentiellement à l’ancienneté des concepts pédologiques utilisés et des typologies/terminologies associées d’une part, à l’absence de données concernant des profils géoréférencés d’autre part. Le MNT ombré de l'ïle de la Réunion avec la localisation de notre zone d'étude.

Nous avons donc réalisée une nouvelle prospection sur notre zone d’étude de 428 km2 (soit 1/5 de l’île). Nous y avons identifié trente types de sols correspondant à des groupes de références (RSGs) de la WRB et à leurs subdivisions, et nous les avons regroupés en quatorze pédopaysages. Le haut du versant est marqué, jusqu’à 900 mètres d'altitude par l’andosolisation. La podzolisation s’y superpose sous forêt entre 1600 et 1800 mètres d'altitude. Le reste du versant est marqué par des teneurs en matière organique toujours fortes, allant en décroissant vers le bas. La saturation du complexe absorbant permet de distinguer une zone moyenne, où les Umbrisols dominent, d’une zone basse, domaine des Phaeozems et sols associés. À chaque tranche altitudinale correspond donc un type de sol bien développé auquel est en général associé un type incomplètement développé (Cambisol) présentant la même tendance pédogénétique.

Depuis un demi-siècle, les progrès accomplis dans la connaissance et la classification des sols développés sur matériaux volcaniques en milieu tropical ainsi que ceux réalisés dans l’appréciation de l’âge des événements du volcanisme constituent deux facteurs d’explication de l’obsolescence rapide des anciennes cartes des sols dans le cas présenté ici. Certains des problèmes rencontrés pour cette étude se poseront probablement à nouveau lors de la réalisation du référentiel pédologique régional de l’île de la Réunion ainsi que pour ceux d’autres DOM. 

Les informations pédologiques acquises sur l'île de la Réunion... au XXe siècle 

La couverture pédologique de l'île a été étudiée à diverses échelles et par différents auteurs depuis 1960. Pour la zone qui nous intéresse, le versant occidental du piton des Neiges, nous mentionnerons, par ordre chronologique, la carte de Riquier et sa notice (1960a et b), l'étude détaillée d'une climatoséquence par Zebrowski (1975), puis les cartes de Raunet (1988, 1989 et 1991a) et son ouvrage de synthèse (Raunet, 1991b).

La carte pédologique de Riquier (ci-dessous) est la plus ancienne carte pédologique de la Réunion qui couvre l'intégralité de la surface de l'île.  

La carte pédologique de Riquier de 1960.

La carte de Raunet de 1988 (ci-dessous) est une première synthèse de plusieurs travaux de cartographie pédologique réalisés dans les années 80 sur plusieurs petits périmètres notamment pour déterminer les aptitudes à l'irrigation des sols de la côte ouest.

La carte pédologique de Raunet de 1988.

 

Ces trois auteurs (Riquier, Zebrowski et Raunet) s'accordent pour reconnaître que les sols sont distribués selon une séquence altitudinale de grands types génétiques. En fait, cette séquence est aussi climatique car, avec l'augmentation de l'altitude, on note une baisse des températures moyennes (0,7°C tous les 100 m), de l'ensoleillement ainsi qu'une augmentation de la pluviosité annuelle. Les conditions climatiques du littoral, 24°C et 800 mm/an, contrastent ainsi fortement avec celles des sommets, 10°C et 1700 mm/an.
Les trois auteurs précités considèrent les termes les plus évolués de la couverture pédologique, c'est-à-dire pratiquement tous les sols pour Riquier (1960a, b), et ceux situés vers le bas de la séquence pour les deux autres, comme des sols ferrallitiques au sens que l'on donnait à ce terme dans les années 60 et qui sera repris dans leur définition par l'ancienne classification française (Aubert et Ségalen, 1966 ; CPCS, 1967). Il s'agissait donc, pour eux, de sols où l'altération des minéraux primaires était poussée (la définition précisait lesquels et spécifiait altération complète), et la formation de minéraux secondaires tels que kaolinite, hydroxydes d'alumine et oxy-hydroxydes de fer, vérifiable à l'aide de techniques minéralogiques et appréciable par le calcul du rapport silice / alumine (dit rapport Ki) sur les résultats de l'analyse triacide alors couramment pratiquée.
Pour les sols qu'il qualifie de ferrallitiques et qui couvrent donc selon lui une très grande partie de l'île, Riquier (1960a et b) se base sur les valeurs du rapport Ki qui sont toujours très inférieures à 2. Il en déduit un degré de ferrallitisation croissant avec l'altitude sans vérification par des analyses minéralogiques, rarement pratiquées à l'époque à laquelle son étude a été réalisée. Les profils étudiés par Riquier peuvent être considérés comme géoréférencés, car indiqués sur sa carte (1960a). Lorsque Riquier rédige sa carte et son rapport, la géologie de l'île de la Réunion vient d'être étudiée par Bussière (1957, 1958) qui suggère un âge de -5 à -2 Ma pour les laves du versant ouest du piton des Neiges et n'y signale aucun recouvrement cendreux. Cet âge important de la roche était compatible avec le développement des sols ferrallitiques épais à altération poussée. Replacée dans son contexte, l'étude de Riquier est irréprochable, elle répondait aux exigences de qualité du moment.
Zebrowski (1975), sur la séquence qu'il étudie entre Saint-Paul et la crête du cirque de Mafate, précise le vocabulaire qu'il utilise pour qualifier les sols réunionnais en commentant les différents résultats des analyses réalisées sur onze profils dont seuls quatre sont géoréferencés, pour les autres le créneau altitudinal est donné. Pour lui, un sol est ferrallitique (type I de sa séquence s'étendant entre 350 et 650 mètres d'altitude et type II entre 650 et 900 mètres d'altitude) s'il présente, en plus d'un rapport Ki faible (compris entre 0,8 et 2,0), une réaction au test du pHNaF nulle (type I) ou très faible (type II). À partir de 900 mètres d'altitude, il identifie des Andosols (type III) caractérisés par une vive réaction au test du pHNaF, mais qui présentent en outre un rapport Ki très faible (<<1) ; ces sols sont présents jusque vers 1500 mètres d'altitude, altitude à partir de laquelle des Podzols (type IV) prennent le relais. Son étude bénéficie des datations effectuées sur les roches par McDougall (1971) qui donnent un âge compris entre -250 000 et -210 000 ans pour les laves de sa séquence, donc un rajeunissement considérable par rapport aux connaissances antérieures. Ceci ne l'amène cependant pas à s'interroger sur la pertinence de l'appellation ferrallitique qui s'appuie une fois encore sur les valeurs du rapport Ki et sur des analyses minéralogiques indiquant la présence de gibbsite à partir de 650 mètres d'altitude et jusque dans les andosols du haut ; plus bas, les minéraux phylliteux sont constitués d'halloysite et de métahalloysite. Zebrowski (1975) n'identifie pas non plus les recouvrements cendreux que Bertrand (1972), qui l'avait précédé, signalait bien dans son étude des sols des stations de la recherche agronomique de l'île de la Réunion (station des Colimaçons pour la zone qui nous intéresse). Précisons encore qu'il ne propose aucun type intermédiaire entre sols ferrallitiques et Andosols.
Ce ne sera pas le cas de Raunet (1988) que les nécessités de sa cartographie amènent à créer de nombreuses unités pour lesquelles il utilise des termes de la classification CPCS. Pour une séquence équivalente à celle étudiée par Zebrowski (1975), il distingue de bas en haut des couronnes altitudinales successives : affleurements rocheux associés à des poches de Vertisols (100 - 150 mètres d'altitude), sols bruns ferruginisés ou non (150 - 550 mètres d'altitude), sols bruns andiques (550 - 700 mètres d'altitude), Andosols désaturés non perhydratés chromiques (700 - 1200 mètres d'altitude), Andosols désaturés perhydratés (1200 - 1800 mètres d'altitude) puis Andosols vitriques (au dessus de 1800 mètres d'altitude). Il n'indique pas de Podzols, mais des Andosols désaturés à mascareignite (1600 - 1800 mètres d'altitude). Enfin, les sols ferrallitiques ne sont plus représentés qu'au nord et au sud de notre zone d'étude sur des coulées d'océanites récentes de la phase II (i.e. les plus anciennes roches affleurantes du volcanisme réunionnais, Quaternaire ancien). Sur ses cartes plus détaillées, Raunet (1989 et 1991a) différencie en outre des types de sols différents à moyenne altitude (< 350 mètres d'altitude) selon qu'ils se situent sur des coulées de la phase III (qui correspondent à des hawaïtes datées d'environ -350 000 à -250 000 ans et qui sont dites « pintade » en raison des cristaux de plagioclases blancs qui contrastent avec la pâte grise) ou des coulées de la phase IV (mugéarites dont l'émission a eu lieu entre -230 000 et -70 000 ans). Les sols, qu'il qualifie de « fersiallitiques » sur roches « pintade », passent latéralement à des sols bruns ferruginisés sur laves plus récentes.

Analyse critique de ces données

On note, d'un auteur à l'autre, d'importantes variations dans l'appréciation de la distribution des sols sur l'île et dans les termes qu'ils utilisent pour les décrire. Ainsi, en 1960, Riquier nommait « sols ferrallitiques beiges » ceux qui seront ensuite qualifiés d'Andosols et reconnaissait déjà des sols à mascareignite. On peut aujourd'hui expliquer cette position singulière en notant qu'en 1960 la roche mère était supposée uniformément ancienne et les connaissances sur les sols formés sur cendres volcaniques étaient encore très embryonnaires. En 1960, le terme ando, d'origine japonaise, commençait à être popularisé après la publication de la 7th Approximation (USDA, 1960) avec la reconnaissance des Andepts comme une sous-catégorie (sous-ordre) des sols peu évolués créée pour des sols contenant au moins 60 % d'allophanes tout en signalant « measures of allophane percentages are very rough » (les déterminations des pourcentages d'allophanes sont très grossières). Aujourd'hui, il n'est pas aisé d'expliquer pourquoi Riquier (1960a et b) n'a pas employé ce vocabulaire alors que dans son tableau comparatif des classifications (Riquier 1960b, page 20) il suggérait que les sols ferrallitiques beiges de l'île de la Réunion pouvaient être corrélés aux sols Ando de Madagascar.
L'étude de Zebrowski (1975) va constituer ensuite une avancée majeure puisqu'il reconnaît les Andosols grâce notamment au test du pHNaF. D'autres aspects intéressants de l'étude de Zebrowski (1975) sont les déterminations minéralogiques qui recoupent les interprétations des analyses au réactif triacide et l'attention qu'il porte à la répartition de la matière organique dans les sols du versant. Il identifie ainsi assez bien la zone où s'exerce la podzolisation en mettant en évidence une redistribution importante des acides fulviques, mécanisme qui se retrouve, bien qu'amorti, dans les premiers Andosols sous les Podzols.

Après cela, les cartographies de Raunet (1988, 1989 et 1991a) préciseront encore les choses. Il est assez curieux de constater que cet auteur et Zebrowski (1975), travaillant sur le même terrain, utilisant un corpus de connaissances scientifiques très voisin et notamment la même classification des sols, arrivent finalement à des résultats assez divergents sur la répartition des différents types de sols. Ainsi Raunet (1988, 1989, 1991a et b) :

Sur ce dernier point, dont nous mesurerons ci-après toute la portée pratique, nous pensons qu'il s'agit là des conséquences d'interprétations différentes du test du pHNaF. La règle qui semblait prévaloir consistait à considérer comme riches en substances amorphes les sols qui présentaient une forte augmentation de pH au bout de deux minutes (la phtaléine du phénol virant au rouge si le test était fait avec cet indicateur ou le pH dépassant 9,4 si l'on utilisait un pH-mètre). Des variantes ont été introduites, notamment par Zebrowski (1975) qui considérait le développement de la couleur rouge en vingt secondes comme caractéristique d'un Andosol et l'obtention d'une couleur rose au bout de deux minutes comme indicatrice de propriétés andiques sans plus.

Signalons enfin que les cartes de Raunet (1988, 1989, 1991a) sont de nature morpho-pédologique, et non strictement pédologique. Elles lui ont permis de représenter très précisément les ravines : ce mot revêt un sens particulier à la Réunion où il désigne des entailles profondes isolant de grands panneaux de lave de types « planèzes » ; elles sont limitées par des parois rocheuses particulièrement abruptes ne portant aucun sol développé. Ces ravines, souvent sèches, notamment dans l'ouest de la Réunion, connaissent des crues. Nous conserverons les « ravines » et « planèzes » de Raunet ainsi que les quatre subdivisions principales des planèzes qu'il retenait et qui nous semblent bien adaptées à la description du milieu et à sa cartographie. Ainsi, nous distinguerons les milieux de haute altitude, les hautes planèzes bosselées, puis les moyennes planèzes et les extrémités de planèzes à topographie ondulée pour ces deux derniers ensembles (Raunet, 1988).

Conclusions à cette analyse

Le document cartographique le plus détaillé disponible, est constitué par les cartes au 1:10 000 du littoral ouest de Raunet (1989 et, partiellement, 1991a). Ces cartes sont de type morphopédologique comme cela vient d'être expliqué. Elles comportent des limites pédogénétiques qui proviennent d'un système taxonomique (CPCS, 1967) peu précis, puisque nous avons vu que sa mise en œuvre par deux auteurs différents pouvait aboutir à des résultats assez différents, et aujourd'hui obsolète. En outre, ces cartes ne s'appuient pas sur un réseau d'observations dûment géoréférencées et elles ne couvrent que la partie basse de notre zone d'étude. Les actualiser en les complétant pour le haut du versant nous a semblé impossible pour les raisons suivantes :

Si l'on considère maintenant l'ensemble des données existantes, cartes et toposéquence, indépendamment de la question appliquée qui nous était posée, on constate que l'amélioration de la connaissance de la couverture pédologique de l'île de la Réunion a été fortement conditionnée par les progrès de l'exploration géologique de l'île, notamment par les datations des phases du volcanisme, ainsi que par l'évolution propre à la science des sols, à ses méthodes d'analyses et à ses concepts. Les sols ont été d'abord considérés comme résultant d'un seul type de pédogenèse, la ferrallitisation. Dans un second temps, l'andosolisation est venue lui disputer la partie haute du versant. Avec Raunet (1988 et 1989), l'extension des sols ferrallitiques a été réduite à son minimum car il ne s'est pas appuyé sur les valeurs du rapport Ki, mais surtout, pensons-nous, en raison d'une incompatibilité de plus en plus flagrante entre âge de roches d'une part, et possibilité que la ferrallitisation en ait affecté une épaisseur importante, d'autre part. Nous pouvons aussi imaginer que c'est l'interprétation des valeurs du rapport Ki, adaptée aux zones de socle, mais moins bien adaptée aux sols développés sur d'autres roches (Pédro, 1966 ; Claisse, 1968), qui a conduit Riquier et Zebrowski à des diagnostiques que l'on peut aujourd'hui considérer comme erronés.
Aujourd'hui la ferrallitisation, concept hérité de la latéritisation, a disparu des systèmes modernes de classification en même temps que disparaissait l'analyse triacide du catalogue des laboratoires. À propos de l'évolution des classifications on doit saluer la perspicacité de G. Aubert, l'un des pères de la classification française, quand il écrivait dans son introduction à la classification des sols ferrallitiques (Aubert et Ségalen, 1966) : « La classification actuelle est, sans aucun doute, fondée trop largement sur les caractères minéralogiques des horizons moyens ou profonds et même du matériau originel du sol, souvent acquis depuis des temps très reculés. Elle ne fait pas intervenir, ou seulement dans quelques cas trop rares, les propriétés -capacité d'échange, degré de saturation- du complexe absorbant... ». 

À l'issue de cette étude critique de l'existant, nous avons décidé de faire une nouvelle prospection alimentant une base de données pédologiques géoréférencées et permettant de refaire une carte des sols en suivant un système taxonomique moderne (IUSS working group WRB, 2007) laissant peu de place aux interprétations personnelles. En plus des éléments de géomorphologie signalés plus haut, nous reprendrons des études précédentes (Raunet, 1988, 1989 et 1991a) la distinction des différentes phases du volcanisme local ; nous en reprendrons aussi les contours et contenus d'unités telles que les ravines, le cordon littoral, les formations alluviales, les cônes volcaniques récents et l'étang de Saint-Paul en les adaptant à la classification choisie.

La carte des pédopaysages et sa légende de Feder et Bourgeon (2009)

Pour la représentation cartographique de la zone étudiée, nous avons distingué quatorze pédopaysages correspondant à autant d'unités cartographiques (figure ci-dessous). Les dix premières unités se répartissent selon les quatre grandes zones altitudinales retenues de haut en bas du versant, quatre autres unités sont indépendantes de ce gradient altitudinal. La figure ci-dessous présente cette carte des pédopaysages sur un fond constitué du réseau routier, du bâti et des courbes de niveau. Cette carte a été réalisée pour une publication au 1:100 000. La localisation des fosses correspondant aux profils-type (tableaux 1 et 2) est indiquée sur la carte par des triangles noirs.

La carte pédologique de Feder et Bourgeon de 2009.

Par construction, une unité de pédopaysage peut regrouper plusieurs unités typologiques de sols ; elle le fait sur la base d’une proximité géographique au sein d’un ensemble géomorphologique et d’une certaine uniformité d’utilisation, ou de mise en valeur. Corrélativement, il n’est pas exclu a priori qu’une unité typologique puisse se retrouver dans plusieurs unités de pédopaysage, mais cela reste exceptionnel, surtout en présence d’un gradient climatique aussi fortement exprimé qu’à l’île de la Réunion. Il est par ailleurs possible qu’une unité de pédopaysage ne soit composée essentiellement que d’une seule unité typologique de sols ; c’est le cas des unités cartographiques 2 et 9 de notre étude.

Le haut du versant est marqué, jusqu’à 900 mètres d'altitude par l’andosolisation. La podzolisation s’y superpose sous forêt entre 1600 et 1800 mètres d'altitude. Elle est certainement facilitée par l’existence d’une couche de phytolithes issus d’une végétation non actuelle de bambous (Nastus borbonicus) comme l’a montré Alarcon (1995) ; cependant, elle correspond bien au développement de véritables horizons spodiques sous l’effet de la migration de composés organiques comme l’indiquait déjà Zebrowski (1975). Nous retrouvons aussi une limite basse de l’andosolisation (900 mètres d'altitude) comparable à celle que proposait Zebrowski (1975) et nettement plus haute que celle de Raunet (en moyenne 700 mètres d'altitude).

Le reste du versant est marqué par des teneurs en matière organique toujours fortes, mais qui vont en décroissant vers le bas. C’est la saturation du complexe absorbant qui permet de distinguer une zone moyenne, où les Umbrisols dominent, d’une zone basse, domaine des Phaeozems et sols associés. 

Tableau 1 : caractéristiques générales des profils-type des sols étudiés : andic Podzol, 1630 m ; silandic Andosol, 1110 m ; haplic Umbrisol, 640 m ; andic Cambisol, 1064 m ; haplic Cambisol, 830 m ; leptic Cambisol, 131 m ; leptic Phaeozem, 262 m.

Profils et horizons

pH

pH

Corg.

Ntot.

CEC

TS a

Couleur

eau

KCl

g/kg

g/kg

cmol/kg

%

Munsell

Andic Podzol (1630 m)

0 - 5/20 cm

4,5

3,6

144

10,8

45,2

5

7,5 YR 3/4

5/10 - 10/30 cm

4,4

3,3

67

4,0

23,8

4

2,5 YR 5/1

10/30 - 20/30 cm

4,3

3,5

141

9,9

52,3

3

5 YR 3/2

20/30 - 70 cm

4,7

4,6

103

5,3

53,5

1

10 YR 4/4

70 - 135 cm

5,1

5,3

19

1,2

26,9

1

10 YR 4/6

Silandic Andosol (1110 m)

0 - 7/15 cm

6,3

5,3

139

11,4

57,5

30

7,5 YR 3/2

7/15 - 40/50 cm

5,9

5,4

66

3,7

42,8

9

10 YR 4/4

40/50 -130/140 cm

5,4

5,8

16

1,0

22,2

3

7,5 YR 4/4

Andic Cambisol (1064 m)

0 - 35 cm

5,1

4,5

40

4,4

36,1

24

10 YR 3/4

35 - 95 cm

5,7

5,2

11

0,9

28,6

18

7,5YR43

95 - 135 cm

5,3

4,7

8

0,6

35,7

11

10 YR 4/3

Haplic Cambisol (830 m)

0 - 40 cm

5,4

4,7

31

3

28,1

19

7,5 YR 4/3

40 - 75 cm

6,0

5,0

29

3,3

25

34

7,5 YR 4/4

75 - 215 cm

6,0

5,6

12

1,1

24

19

7,5 YR 4/4

Haplic Umbrisol (640 m)

0 - 30 cm

5,2

4,8

31

3,1

26,0

29

10 YR 3/2

30 - 80 cm

5,3

4,8

25

2,7

25,8

28

7,5 YR 3/2

80 - 150 cm

5,7

6,7

6

0,6

24,2

31

10 YR 3/3

Leptic Phaeozem (262 m)

0 - 50 cm

6,9

6,0

25

2,4

22,7

85

7,5 YR 3/2

Leptic Cambisol (131 m)

0 - 15 cm

6,6

5,3

20

1,6

26,1

85

5 YR 3/4

15 - 40 cm

7,2

5,8

4

0,4

36,3

76

2,5 YR 3/4

40 - 85 cm

7,1

5,6

2

0,2

36,5

75

2,5 YR 3/6

a taux de saturation en bases.
 

Tableau 2 : propriétés andiques et quantités de Fe, Al et Si extraites par les réactifs oxalate d’ammonium à pH 3 (o) et citrate-bicarbonate-dithionite (d).

Profils et horizons

da a

P ret. b

oxalfe c

pH

Si(o)

Fe(d)

Al(d)

Si(d)

g/cm3

%

%

NaF

g/kg

g/kg

g/kg

g/kg

Andic Podzol (1630 m)

0 - 5/20 cm

n.d.

65

2,4

7,7

3

34

9

6

5/10 - 10/30 cm

0,39

30

0,5

7,4

1

12

2

10

10/30 - 20/30 cm

n.d.

77

3,0

7,8

2

52

10

6

20/30 - 70 cm

0,44

95

9,3

10,9

24

71

56

9

70 - 135 cm

0,85

94

7,8

10,4

25

112

55

19

Silandic Andosol (1110 m)

0 - 7/15 cm

0,58

96

8,1

10,7

16

85

45

5

7/15 - 40/50 cm

0,75

94

9,0

10,8

21

107

57

9

40/50 -130/140 cm

0,77

94

7,1

10,5

25

124

56

18

Andic Cambisol (1064 m)

0 - 35 cm

1,09

84

2,8

9,2

5

76

24

7

35 - 95 cm

0,70

90

2,0

8,2

3

91

19

5

95 - 135 cm

0,72

97

2,5

9,1

7

99

29

11

Haplic Cambisol (830 m)

0 - 40 cm

1,06

80

3,5

9,7

7

94

34

9

40 - 75 cm

0,80

77

2,9

9,2

5

93

28

7

75 - 215 cm

0,78

93

3,8

10,0

10

106

41

12

Haplic Umbrisol (640 m)

0 - 30 cm

1,18

67

1,0

8,5

1

75

16

3

30 - 80 cm

1,10

80

1,2

8,6

1

81

17

3

80 - 150 cm

1,00

87

1,1

9,2

2

83

16

3

Leptic Phaeozem (262 m)

0 - 50 cm

1,30

42

0,7

8,2

2

61

5

5

Leptic Cambisol (131 m)

0 - 15 cm

1,27

31

0,5

8,1

1

59

4

5

15 - 40 cm

1,32

50

0,7

9,1

2

65

4

6

40 - 85 cm

1,42

47

0,7

8,9

2

51

4

9

a Densité apparente ; b Rétention des phosphates (méthode Blakemore) ; c l'indice oxalfe = Al(o) + ½ Fe(o) ; n.d. non déterminé. 

Dans le détail, si nous comparons les différentes études recensées sur la zone de notre projet avec la nôtre au niveau de la séquence de Zebrowski, seul endroit où la comparaison est réalisable, nous constatons qu'il n'existe aucune correspondance bi-univoque entre deux de ces études. Ceci condamne tout espoir de réactualisation d'une ancienne carte à peu de frais, c'est-à-dire en gardant le contour des unités tout en adaptant le contenu. L'ancienneté n'apparaît pas comme le facteur déterminant la difficulté potentielle d'une réactualisation car l'étude la plus récente avant la nôtre (Raunet, 1988) avec ses andosols qui descendent jusqu'à 700 mètres d'altitude et ses sols bruns andiques entre 500 et 700 mètres d'altitude, n'apparaît pas plus facile à réactualiser que la plus ancienne (Riquier, 1960). Entre les deux, celle de Zebrowski (1975), plus satisfaisante à certains égards (bonne limite des andosols et identification correcte des podzols), ne concerne qu'une toposéquence et ne commence qu'au-dessus de 350 mètres d'altitude.

Bibliographie 

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